08. 04. 2019
Réflexions sur la question du stationnement en zone urbaine
La question du stationnement est presque aussi brûlante que celle de la circulation, qui entraîne une diminution de la qualité de vie du moins dans les agglomérations en produisant des émissions olfactives et sonores, des risques d’accident, etc. La raison ici en est le coût de ce stationnement. Lisez le blog de notre rédacteur externe Samuel Bernhard.
Afin de se faire une meilleure idée des dimensions de cette problématique du stationnement, posons d’abord quelques chiffres. Un véhicule personnel est à l’arrêt environ 22,5 heures par jour en moyenne. Il lui faut pour cela une place de stationnement qui représente entre 10,8 et 13,6 m2 de surface hors zone d’accès et chaussée. Cela correspond à la taille d'une chambre d’enfant moyenne à grande.
Le véhicule essentiellement à l’arrêt occasionne un besoin d’espace à la fois là où son propriétaire habite et là où il se rend. Le nombre de places de parking en Suisse est estimé entre 8 et 10 millions ce qui correspond, pour un nombre de véhicules d’environ 6,8 millions d’unités (dont environ 4,6 millions de véhicules personnels), à environ deux emplacements par véhicule. La surface totale de stationnement disponible en Suisse correspondrait donc à environ 120 km2, soit à peu près la taille du lac des Quatre-Cantons.
Combien coûte une place de stationnement?
Pour une place de stationnement privé, il faut inclure les frais fixes d’acquisition du terrain, de construction et de démantèlement. À cela s’ajoutent les frais d’exploitation (par exemple nettoyage, entretien et coût du capital). L’emplacement est le facteur le plus important sur le coût d’acquisition du terrain. 1 m2 de terrain constructible en Suisse coûte en moyenne entre 600 et 800 francs. La taille et la forme du projet de construction jouent également un rôle important, car ils ont une influence sur l’aménagement des emplacements individuels. Et si le lotissement est construit contre une colline ou s’il y a des problèmes avec la nappe phréatique, cela peut augmenter les frais de construction.
En raison des coûts de construction moins élevés, les places de stationnement en surface représentent environ la moitié des coûts. Les places en parking souterrain coûtent très cher dans tous les cas : Une telle place de stationnement dans un petit immeuble de la société de construction et de gestion Wohnstadt dans l’agglomération de Bâle coûte entre 40 000 et 80 000 CHF. Afin d’amortir ces coûts, ces emplacements de parking devraient être loués sans perte durant l’ensemble de la durée du projet (qui est traditionnellement de 50 à 100 ans pour des immeubles d’habitation). Sur la base du taux d’amortissement de 5 %, pour une place de stationnement qui a coûté 50'000 CHF à la construction, le montant est donc de 2500 CHF par an ou 200 CHF par mois. Mais dans les endroits moins centraux, 200 francs environ pour une place de parking ne correspond pas au prix du marché que les locataires sont prêts à payer.
Un manque de places de stationnement dans le centre
Il existe des emplacements favorables dans les centres-villes où des prix très élevés sont atteints pour la location de places de stationnement. Un emplacement privé proche de la Aeschenplatz à Bâle coûte par exemple jusqu’à 300 francs par mois ou plus. Il faut aussi prendre en compte que dans ces zones, des places de parking moins chères sont également proposées, notamment par des institutions publiques. Nous y reviendrons ultérieurement. Le stationnement est en général problématique dans les zones à forte densité d’emplois. La demande accrue de places de stationnement provient principalement de personnes ayant une activité professionnelle. Il faut évoquer ici aussi la politique des entreprises. Celle-ci peut influencer le choix de transport de leurs employés avec les incitations adaptées.
Diverses raisons expliquent pourquoi la réponse au manque croissant de places de stationnement n’est pas simplement de proposer davantage de places:
- Réduire le trafic privé et concevoir des centres-villes sans circulation fait consensus dans les villes.
- La sécurité des transports et la qualité de la vie de la population sont aussi en question
- L'espace est rare dans les centres-villes qui se sont développées
- Un espace rare et coûteux est nécessaire pour d'autres utilisations
Les problèmes de stationnement ne se limitent pas aux centres-villes, ils touchent aussi la périphérie. Mais dans le sens inverse.
Des places vides en périphérie
Cette situation est confirmée par les chiffres de la Bruppacher Verwaltungs AG. Selon ces derniers, 0 à 5 % des places de stationnement en hyper-centre de Zurich, où les prix sont élevés, sont vides. Dans les quartiers périphériques, c’est 10 % ou plus une étude du Credit Suisse confirme aussi l’existence de ces places vides. Dans une analyse des propriétés immobilières dans toute la Suisse, celle-ci est parvenue à la conclusion qu'il existe de nombreuses places de stationnement inoccupées dans des communes très développées. Les places non louées représentent 29 % du parc en moyenne, avec des valeurs allant de 0 à 68 %. Pour les communautés (seulement) bien développées, la valeur moyenne des places de stationnement non louées est encore de 14%, bien qu'il y ait aussi des quartiers avec 30% de places vacantes.
Pourquoi construit-on trop de places de stationnement dans des zones non centrales qui ne comportent que peu d’emploi? Il faut en particulier mentionner la réglementation stricte sur les places de stationnement pour les maîtres d’œuvre. Le canton de Bâle-Campagne est un exemple extrême qui exige 1,3 place pour tout nouveau logement construit. La marge de manœuvre des communes du canton est réduite. Le besoin en places de stationnement dans la région de Bâle est estimé de 0,4 à 0,8. Cette estimation est plausible car la proportion de foyers sans véhicule dans la ville de Bâle est de 52 %. La part des foyers sans véhicule sur l’ensemble de la Suisse est de 22 %, avec une tendance croissante. Cette part des foyers sans véhicule devrait être proche de 30 % dans les agglomérations. En conséquence, les zones proches des villes du canton de Bâle-Campagne affichent une offre excessive de places de stationnement. La faible densité des emplois rend quasiment impossible leur location.
Les places privées en concurrence aves les places publiques plus abordables
La problématique des places vides privées est aggravée par les prescriptions et dispositions relatives aux emplacements publics. En effet, les places de parking privées, qui sont amorties par les constructeurs, sont en concurrence avec celles-ci. Pourquoi un locataire devrait-il payer 150-200 CHF par mois pour une place dans un garage souterrain quand la ville lui propose un emplacement à prix très avantageux de 280 CHF par an ne serait-ce que pour citer l’exemple de Bâle ? La raison de ces tarifs avantageux se trouve dans la Constitution fédérale, qui rend pratiquement impossible la tarification de l’utilisation des routes. Par conséquent, les villes ne peuvent imposer des redevances pour l'utilisation des routes ou des places de stationnement dans les rues que dans une mesure limitée. La ville de Zurich perçoit ainsi une «redevance de contrôle» pour «l’utilisation commune» en zone bleue et une autre «redevance de contrôle» légèrement plus élevée pour «l’utilisation commune accrue» en zone blanche. Un ticket de stationnement pour un résident local coûte 300 francs par an : le permis pour riverain coûte 300 CHF par an.
L’unique possibilité pour les communes de concevoir leur territoire avec moins de trafic (et donc moins de bruit et de pollution, plus sûr et de meilleure qualité pour les habitants) est de réduire le nombre des emplacements de stationnement. Ceci peut également être appliqué à la circulation motorisée de banlieue, ce qui représente, par exemple, dans la ville de Zurich l'une des principales préoccupations de la population urbaine.
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